dimanche 20 janvier 2008

Evaluation et présidentialisme

Les rapports qu'on est obligé de faire, ces temps-ci ; les rapports qui s'imposent !
Depuis qu'on va "évaluer" les ministres, et passer les carrières au filtre de ce système de valeur produit de l'industrie du consulting (ici un produit a été commandé, acheté, et fourni, par un cabinet privé et au client Etat : celui de l'évaluation du gouvernement), le règne de l'évaluation a gagné une surface d'application - sur laquelle tout superlatif est justifé, pas la peine d'y revenir. Y repérer bien la confirmation et l'extension maximale (mais on est toujours surpris que l'extension s'étire encore, jusqu'à des impensables, réalisés à toute vitesse) de la pratique ordinaire : il s'agit de remplacer un système de la valeur, public (représentation et responsabilité), par un autre, privé (comptabilisation, 1+1+1...). Fonctionnariat par la logique du contrat de droit privé ; l'Etat par l'entreprise ; la démocratie parlementaire par l'économisme et, précisément, le capitalisme social - comment dire? : l'économisme qui fait capital de la société même, de ses institutions et de ses processus.

Les remplacements : à la notation, système de la fonction publique, se substitue le bilan de compétences, portefeuille et contrat de l'individu entrepreneur de lui-même. Les bibliothécaires de Paris 8 nous en transmette les échos. Ici, s'établit en fonctionnement parallèle : l'évaluation des ministres, substituée à leur responsabilité, devant la représentation nationale. Le gouvernement, son présidentialisme, sans devoir de répondre devant le parlement ; le Premier ministre sans fonctionnement comme démissionnable ; la libéralisation de la fonction présidentielle, partant en orbite solitaire - son acteur minaudant ensuite de populisme alors même que la représentation démocratique devient toujours plus impossiblement lointaine, comme un vieux souvenir et une utopie infaisablement épuisante.
Commencer, donc, par un parlement. - Evidemment, ça ne se prend pas de front.
Une démocratie.

L'histoire des centralisations du pouvoir en France a la peau dure, et une inventivité mauvaise. Elle vient se moderniser en insérant le pays dans une "communauté internationale" qui se reconfigure très vite elle aussi. Difficile de suivre ; nous laisse haletants et la tête tournée. Half-blind with dust, in the fray : chercher bien les lignes de faille, les sentir au bout des doigts et des écrits, au bout des vies sociales et des quotidiens. Relentless erudition, et les patients décodages. Les contre-discours, et les modes du savoir à façonner.

On attend, bien sûr, l'évaluation du Président de la République, puisque seul ce poste semble hors d'atteinte du rouleau compresseur de la valeur : son ombilic. C'est cette question qui fait paginus - pôle du pouvoir et totem : la page à écrire, alors.

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