lundi 25 février 2008

Stratégie, et rapport de science - Foucault

Préoccupation - disons souci, de soi, et des questions - de Foucault : le stratégique. Quelque chose de plus finement incisif, car historique et politique, que la logique de la véridiction, proposée ailleurs comme caractère de l'action de l'intellectuel.
Dans l'étude du "néolibéralisme contemporain" - et faire le cours du Collège de France, Naissance de la biopolitique donc, en 1978-1979 situe fort. Après, on aura "la décennie", "le grand cauchemar des années 1980", Cusset -, voir à l'oeuvre les coups de force spéculatifs des théoriciens de l'Ecole de Fribourg, les renversements de perspectives. Voir, précisément, comme ils se construisent un "champ d'adversité". Former un point de débat, placer les positions et les positionnés, régir l'échiquier et les mouvements, et maîtriser, naturellement, le jeu. En montrant d'ailleurs que les questions (le rapport liberté économique et politique étatique) relèvent d'un jeu formel plutôt que d'une nature donnée : ce pli.
Le stratégique, c'est faire l'analyse du stratégique, politique et théorique, de ces gestes de "néo". Et suivre, apprendre, la pragmatique politique qui s'y compose, dans un rapport inédit, encore un, entre savoir et praxis. Le "néolibéralisme contemporain" offrant le visage d'un nouveau cas dans la série historique des configurations du savoir-pouvoir. D'où découle la question, actuelle (presque 30 ans plus tard), du capitalisme cognitif. La prise se fait depuis une critique de tout saint-simonisme, ou social engineering ; rationalité de gouvernement. Et dans le champ d'influence, pour ce qui concerne une technique épistémologique, de Husserl, sa Crise des sciences européennes (posth., mais autour de 1928 je crois), et l'articulation entre structure formelle et conditions.
Saint-Simon : remédier à la crise ouverte par la Révolution (Naissance, note, p.133), Du système industriel, 1821 : "refonte générale du système social", substituant le "système industriel", fondé sur la domination des industriels et des savants et organisant toute la société en vue du "but industriel", à l'ancien "système féodal et militaire". Comte lié au mouvement, marqué en 1824. Rôle du saint-simonisme dans la politique coloniale de la monarchie de Juillet, chemins de fer, canal de Suez. Critique par W. Röpke, dans Civitas Humana, ou les Questions fondamentales de la Réforme économique et sociale : capitalisme, collectivisme, humanisme économique, Etat, société, économie, 1944 :
"Le succès de cette école provenait du fait suivant : on tirait du scientisme [il y a la dimension du positivisme, à faire jouer dans cette généalogie] les dernières conséquences pour la vie sociale et pour la politique et l'on parvenait ainsi au but inévitable en cette voie : au collectivisme, qui transporte, dans la pratique économique et politique, l'élimination scientiste de l'homme. Sa gloire fort contestable, c'est d'avoir créé le modèle d'une conception du monde et de la société que l'on pourrait appeler l'éternel saint-simonisme : l'état d'esprit mécanique-quantitatif même de l'hybris scientifique et de la mentalité des ingénieurs, état d'esprit de ceux qui unissent le culte du colossal à leur besoin de se faire valoir, qui construisent et organisent l'économie, l'Etat et la société, suivant des lois prétendument scientifiques avec le compas et la règle et qui, se faisant, se réservent à eux-même les premières places au bureau."

Ecole de Fribourg et Ecole de Frankfort : en rapport autour du weberisme : correction de Marx. Et du rapport des sciences sociales (économie, politique, histoire, société) au social et au politique.
Bien sûr le politique n'est pas seulement d'Etat, ni de gouvernement. Reste ce qu'on ne saisit grossièrement que avec la notion de "société".

Le stratégique, la question de la stratégie, comme complexification du rapport de science. Deleuze et Guattari partent avec leur concept comme machine de guerre. Et la question du positionnement par rapport à l'histoire : historicité, milieu, plutôt qu'organisation prévision. Savoir et faire, pratique (et rapport de pouvoir). Qui reprend encore, décale, le rapport libéral classique du laisser-faire - il est néo-libéralisme en ce qu'il produit, activement, délibérément ; il y a un savoir à composer de ça, et une pratique de savoir et des institutions, des agences de savoir, neuves à instaurer. D'autres à dé-composer. Par le geste de la création d'un plan conceptuel et idéologique spécifique : champ d'adversité, où se compose une collusion polémique entre tous les interventionnismes d'Etat, du keynesisme au nazisme. Champ d'adversité et polémos. Offensive. Une pratique qui tire pouvoir, conceptuel & idéologique, du conflit. Question de la force des idées.
Puis, une industrie, au développement parallèle foudroyant, du conseil et produit cognitif - qui est à déconfondre du technocratisme.

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