D'où la perplexité, la naïveté qu'il faut sans cesse rogner, devant les alliances actuelles entre le retour des Lettres, post-théorie et faisant passer la théorie (A. Compagnon toujours, voir, toujours, la Leçon inaugurale la chaire de "Littérature française moderne et contemporaine : histoire, critique, théorie", La littérature, pour quoi faire?, publiée en mai 2007), et le pouvoir, dans son entreprise de démaillage scientifique pour la mise en place d'un noveau modèle, économique, de "l'excellence".
L'antérieur, les antérieurs, avaient été quoi : culturel, élitaire républicain, etc. Avec une poussée du scientifique sur le modèle allemand après la défaîte géopolitique de 1871, développé ensuite sur celui du scientisme de la big science entre les deux guerres. Industrialisation.
Ces alliances, d'un conservatisme culturel qui répond au vide de pensée politique du côté de la boîte "les valeurs" : c'est cette satisfaction? pour le populisme élu. Et d'une mise en "concurrence" du cognitif.
C'est cette dynamique, qui fait aussi le sarkozysme dans la mesure où il a marqué un noeud politique en mai 2007, avec ses traînes complexes et même brouillées aujourd'hui, qui continue à laisser rêveur. La culture, Culture, comme cache-pouvoir - son ordinaire. Une composante d'identité nationale y joue aussi - l'esprit français avec ses rappels subliminaux.
vendredi 27 juin 2008
Ressources de l'histoire - pouvoirs des Lettres
Et pas seulement son usage et mésusage (voir l'édition "participative" sur Médiapart).
C. Charle sur la faculté des Lettres de la Sorbonne (what other?), et ses mailles avec le pouvoir exécutif, en ces temps de tension politique : Paul Mazon rapporte son entrevue avec le ministre Doumergue, après que celui-ci ait contourné l'avis de la commission de spécialistes pour une nomination (La République des universitaires, 234) :
Oui, j'ai causé hier avec le ministre pendant plus d'une demi-heure. C'est un très honnête homme : je le savais déjà. Il m'a déclaré qu'il n'agissait sous aucune pression, sans arrière-pensée politique ou autre. Mais il trouve décourageant pour les professeurs de province de voir qu'on ne tient pas compte de leur ancienneté et de leurs titres. J'ai répondu qu'il serait encore plus décourageant pour eux de voir qu'on ne tient pas compte de l'avis des gens cmpétents. Je lui ai aors expliqué [...]. (J'ai expliqué au ministre ce que c'était qu'une "explication" grecque). Il m'a opposé des chicanes, il a fait venir des dossiers et montré des notes d'agrégation d'il y a dix ans. Je lui ai ri au nez. Il a convenu que l'argument n'était pas sérieux. Enfin je lui ai commenté la décision de la Faculté et la difficulté qu'il y avait à n'en tenir aucun compte [...]. (28 juillet 1908).
La question, pour les Lettres spécifiquement, des rapports d'ingérence politique, et de "l'inachèvement de l'autonomie" scientifique. Qui se rejoue, bien entendu : le point intéressant à regarder est le changement du terrain. La dévalorisation du "pouvoir culturel" et du "pouvoir intellectuel" du champ dans son ensemble modifiant, par dynamique sociologique ordinaire, les jeux, travaux et oeuvres, clivages et alliances, possibles en son sein.
C'est donc : le dénouage de ce contrat culturel où "les valeurs culturelles transmises par les disciplines littéraires [étaient] parties prenantes dans la légitimation du pouvoir social, en lettres, philosophie, histoire, voire en langues" (241) ; et où la Sorbonne avait à ramer dur, et ambigu parfois, pour "garder sa position dominante dans la transmission de la culture nationale", en face à la fois de "l'impérialisme scientifique" et "du domaine incontesté du droit dans une société libérale".
Enseignements : les "moments d'intense politisation des enjeux intellectuels" (228 - anticléricalisme d'Etat), "mise en cause du statut universitaire" (dans les nominations et autres ingérences de l'exécutif), conflits avec refus de la raison d'Etat, promotion de "la nécessité d'un pouvoir des 'intellectuels' " par les facultés, et travail continu de reconquête de l'autonomie universitaire contre l'Université napoléonienne, ses Ecoles spéciales et sa vision ingénieriste du savoir, et ses confusions entre hiérarchies scientifiques et administratives (le modèle de l'élite comme haut fonctionnariat).
Sur les Lettres spécifiquement, dans l'étude historique des situations locales de cooptations : le pouvoir intellectuel, et le pouvoir culturel, en jeu.
Pour les Lettres et les langues : l'enjeu est un rayonnement national, l'orientation des disciplines vers la représentation de la Culture française, l'esprit français (dont : enjeu diplomatique, dans l'équilibre des pouvoirs en Europe, fin XIXe et jusqu'aux années 1930). Plus on approche d'elle, plus le baromètre des enjeux monte.
C. Charle sur la faculté des Lettres de la Sorbonne (what other?), et ses mailles avec le pouvoir exécutif, en ces temps de tension politique : Paul Mazon rapporte son entrevue avec le ministre Doumergue, après que celui-ci ait contourné l'avis de la commission de spécialistes pour une nomination (La République des universitaires, 234) :
Oui, j'ai causé hier avec le ministre pendant plus d'une demi-heure. C'est un très honnête homme : je le savais déjà. Il m'a déclaré qu'il n'agissait sous aucune pression, sans arrière-pensée politique ou autre. Mais il trouve décourageant pour les professeurs de province de voir qu'on ne tient pas compte de leur ancienneté et de leurs titres. J'ai répondu qu'il serait encore plus décourageant pour eux de voir qu'on ne tient pas compte de l'avis des gens cmpétents. Je lui ai aors expliqué [...]. (J'ai expliqué au ministre ce que c'était qu'une "explication" grecque). Il m'a opposé des chicanes, il a fait venir des dossiers et montré des notes d'agrégation d'il y a dix ans. Je lui ai ri au nez. Il a convenu que l'argument n'était pas sérieux. Enfin je lui ai commenté la décision de la Faculté et la difficulté qu'il y avait à n'en tenir aucun compte [...]. (28 juillet 1908).
La question, pour les Lettres spécifiquement, des rapports d'ingérence politique, et de "l'inachèvement de l'autonomie" scientifique. Qui se rejoue, bien entendu : le point intéressant à regarder est le changement du terrain. La dévalorisation du "pouvoir culturel" et du "pouvoir intellectuel" du champ dans son ensemble modifiant, par dynamique sociologique ordinaire, les jeux, travaux et oeuvres, clivages et alliances, possibles en son sein.
C'est donc : le dénouage de ce contrat culturel où "les valeurs culturelles transmises par les disciplines littéraires [étaient] parties prenantes dans la légitimation du pouvoir social, en lettres, philosophie, histoire, voire en langues" (241) ; et où la Sorbonne avait à ramer dur, et ambigu parfois, pour "garder sa position dominante dans la transmission de la culture nationale", en face à la fois de "l'impérialisme scientifique" et "du domaine incontesté du droit dans une société libérale".
Enseignements : les "moments d'intense politisation des enjeux intellectuels" (228 - anticléricalisme d'Etat), "mise en cause du statut universitaire" (dans les nominations et autres ingérences de l'exécutif), conflits avec refus de la raison d'Etat, promotion de "la nécessité d'un pouvoir des 'intellectuels' " par les facultés, et travail continu de reconquête de l'autonomie universitaire contre l'Université napoléonienne, ses Ecoles spéciales et sa vision ingénieriste du savoir, et ses confusions entre hiérarchies scientifiques et administratives (le modèle de l'élite comme haut fonctionnariat).
Sur les Lettres spécifiquement, dans l'étude historique des situations locales de cooptations : le pouvoir intellectuel, et le pouvoir culturel, en jeu.
Pour les Lettres et les langues : l'enjeu est un rayonnement national, l'orientation des disciplines vers la représentation de la Culture française, l'esprit français (dont : enjeu diplomatique, dans l'équilibre des pouvoirs en Europe, fin XIXe et jusqu'aux années 1930). Plus on approche d'elle, plus le baromètre des enjeux monte.
jeudi 26 juin 2008
Les concepts qui nous gouvernent
Il s'agit de rentrer mieux - c'est infini, puisqu'au-delà d'une cartographie qui est encore entièrement à faire pour moi, il y a le milieu de l'histoire, et ses mobilités - dans l'épaisseur de cet embrayeur culturel des savoirs qui déterminent les décisions de policy, et les tendances historiques de la "société civile", où les poids des conditions matérielles etc. font ballast vers des tipping ou des interties stabilisatrices ou des accélérations inattendues. La résultante de ces forces étant le milieu de la vie hic et nunc.
Soif de plans d'imagination conceptuelle des disciplines : sciences sociales et historiques, sociologies des savoirs et des pouvoirs, histoire des disciplines et des modèles de scientificité avec leurs rapports à leur société et du génie national à la géopolitique culturelle, La Suite dans les idées sur France Culture me fait un goutte à goutte d'initiation, Christophe Charle rentrant dans le détail stratégique du champ social universitaire de la Troisième République fournit des dénouements d'enjeux qui font sourire de bien-être, ces lucidités : les frottements locaux, les différenciations des champs (Paris/province, sciences/lettres, étrangers et femmes, critique littéraire/scientisme littéraire, principes intellectuels/usages sociaux des carrières et des prestiges etc.). Michel Espagne à entamer, sur les disciplines de l'étranger et "les Philologiques".
Concepts qui nous gouvernent : il y a un noeud de contributions, des sciences et de la culture (lenteur inertique, chorale, de l'histoire), de l'idéologie, et des forces politiques qui poussent par le bas en tecthonique. Ces synergies à sentir, et trouver des angles de perspective qui permettent d'en dire le jeu, et d'en mesurer les forces, les enjeux, les horizons.
Les sciences universitaires, et celles des Ecoles spéciales : ingénieries des matières et des valeurs, jusqu'à l'Administration. Je pense à l'émission de la Suite dans les idées consacrée cette semaine à la construction européenne et aux savoirs de sciences sociales qui la poussent : sont engagés les questions des lieux et statuts institutionnels de la pensée du social aux Etats-Unis, en tant qu'elle donne le la (think tanks en premier lieu, par exemple contribuant par millieurs de chercheurs à l'Association d'Etudes européennes - et le relais des lobbies ou ONG), et traditionnellement les juristes européens, puis les sciences politiques (tournant européen des cursus à l'ENA, à l'IEP de Paris), puis le travail de détermination des policy makers, commissions et experts et rapports et auditions et délibérations, et des parlements (partis, donc, et relais politiques, syndicats, associations, professionnelles et "civiles" etc.) - c'est une rencontre et un noeud de malentendu, de relais conflictuel, où se joue un présent culturel large.
Il faut embrasser cet ensemble. Et les grands pans invisibles des institutions non publiques, alternatives, grises - réseaux de l'argent, de l'influence (privée et de "société civile", pousse des ONG depuis les années 80), de la lecture, des réunions, des usages au ras de l'humain et ses traînes d'histoire. Rouages, usages des rapports.
Toujours : pourquoi ces savoirs sont-ils si obscurs ? C'est une formation à ça qui est cruciale.
Soif de plans d'imagination conceptuelle des disciplines : sciences sociales et historiques, sociologies des savoirs et des pouvoirs, histoire des disciplines et des modèles de scientificité avec leurs rapports à leur société et du génie national à la géopolitique culturelle, La Suite dans les idées sur France Culture me fait un goutte à goutte d'initiation, Christophe Charle rentrant dans le détail stratégique du champ social universitaire de la Troisième République fournit des dénouements d'enjeux qui font sourire de bien-être, ces lucidités : les frottements locaux, les différenciations des champs (Paris/province, sciences/lettres, étrangers et femmes, critique littéraire/scientisme littéraire, principes intellectuels/usages sociaux des carrières et des prestiges etc.). Michel Espagne à entamer, sur les disciplines de l'étranger et "les Philologiques".
Concepts qui nous gouvernent : il y a un noeud de contributions, des sciences et de la culture (lenteur inertique, chorale, de l'histoire), de l'idéologie, et des forces politiques qui poussent par le bas en tecthonique. Ces synergies à sentir, et trouver des angles de perspective qui permettent d'en dire le jeu, et d'en mesurer les forces, les enjeux, les horizons.
Les sciences universitaires, et celles des Ecoles spéciales : ingénieries des matières et des valeurs, jusqu'à l'Administration. Je pense à l'émission de la Suite dans les idées consacrée cette semaine à la construction européenne et aux savoirs de sciences sociales qui la poussent : sont engagés les questions des lieux et statuts institutionnels de la pensée du social aux Etats-Unis, en tant qu'elle donne le la (think tanks en premier lieu, par exemple contribuant par millieurs de chercheurs à l'Association d'Etudes européennes - et le relais des lobbies ou ONG), et traditionnellement les juristes européens, puis les sciences politiques (tournant européen des cursus à l'ENA, à l'IEP de Paris), puis le travail de détermination des policy makers, commissions et experts et rapports et auditions et délibérations, et des parlements (partis, donc, et relais politiques, syndicats, associations, professionnelles et "civiles" etc.) - c'est une rencontre et un noeud de malentendu, de relais conflictuel, où se joue un présent culturel large.
Il faut embrasser cet ensemble. Et les grands pans invisibles des institutions non publiques, alternatives, grises - réseaux de l'argent, de l'influence (privée et de "société civile", pousse des ONG depuis les années 80), de la lecture, des réunions, des usages au ras de l'humain et ses traînes d'histoire. Rouages, usages des rapports.
Toujours : pourquoi ces savoirs sont-ils si obscurs ? C'est une formation à ça qui est cruciale.
vendredi 20 juin 2008
Histoire des valorisations sociales
Christophe Charle, La République des universitaires, 1994.
J'entre lentement dans la logique de ce travail - prendre l'université, dans son histoire, comme terrain d'une histoire sociale, des élites. De la société dans ses dynamiques de hiérarchies - les différentiels sociaux, mobiles. Questions des "héritiers" et des "parvenus", des groupes et de leur équilibre constamment refait, avec les lignes de tension en constante recomposition.
Je regarde les outils qui se forment devant cet objet (avant l'étude de 1994 : Naissance des "intellectuels", aussi), et les questions de méthode explicitées, travaillées, soulevées par lui.
. les trajectoires individuelles, comme tracés des possibles dans les champs (qu'elles participent à configurer, en temps réel) : la méthode est prosopographique.
. elle est aussi comparative : puisque le milieu de ces questions est relationnel et relatif. Berlin et Paris permettent le jeu comparatiste.
. permettent en particulier d'identifier quelque chose des rapports entre le politique et le professionnel et institutionnel : "l'habitus élitiste" allemand persistant dans un système libéral et originellement aristocratique, bousculé ou accéléré par l'intervention de l'unité allemande et la victoire de 1871 ; la méritocratie démocratique de la Troisième République française, avec sa bourgeoisie en promotion sociale et ses solidarités entre secondaire et supérieur - enseignement et recherche (curieusement, puisqu'on pouvait aussi situer l'origine de ce trope idéologique de l'université dans l'invention humboldtienne).
. de même, le jeu des plans sans parallèlisme : esprit de corps et parisianisme et noblesse culturelle / "sélection purement intellectuelle au-delà des classes sociales et des ordres d'enseignement" (97).
. une clé est la différence entre les devenirs possibles dans les différentes disciplines. Lettres, sciences, droit, médecine, et les destins distincts - les places sociales respectives en mutation.
. un point de vue inattendu : le "sentiment sociologique" des individus dans cette histoire - disons ça comme ça, pour pouvoir le penser en continuité avec le "sentiment linguistique" de Saussure. Questions d'identité sociale, d'envies et de rancoeurs et d'énergisations ; expériences de la société. Que Charle mesure par les critères de rémunération, de trajets de carrière dans les champs différentiels du prestige, de la réputation, et de la respectabilité sociale.
. au coeur : le capital culturel, l'annoblissement culturel (et les propositions de Bourdieu). Un rapport, encore à travailler pour moi, du social au culturel au savoir à l'institutionnel au professionnel. Ce noeud, traversé par cette histoire.
J'entre lentement dans la logique de ce travail - prendre l'université, dans son histoire, comme terrain d'une histoire sociale, des élites. De la société dans ses dynamiques de hiérarchies - les différentiels sociaux, mobiles. Questions des "héritiers" et des "parvenus", des groupes et de leur équilibre constamment refait, avec les lignes de tension en constante recomposition.
Je regarde les outils qui se forment devant cet objet (avant l'étude de 1994 : Naissance des "intellectuels", aussi), et les questions de méthode explicitées, travaillées, soulevées par lui.
. les trajectoires individuelles, comme tracés des possibles dans les champs (qu'elles participent à configurer, en temps réel) : la méthode est prosopographique.
. elle est aussi comparative : puisque le milieu de ces questions est relationnel et relatif. Berlin et Paris permettent le jeu comparatiste.
. permettent en particulier d'identifier quelque chose des rapports entre le politique et le professionnel et institutionnel : "l'habitus élitiste" allemand persistant dans un système libéral et originellement aristocratique, bousculé ou accéléré par l'intervention de l'unité allemande et la victoire de 1871 ; la méritocratie démocratique de la Troisième République française, avec sa bourgeoisie en promotion sociale et ses solidarités entre secondaire et supérieur - enseignement et recherche (curieusement, puisqu'on pouvait aussi situer l'origine de ce trope idéologique de l'université dans l'invention humboldtienne).
. de même, le jeu des plans sans parallèlisme : esprit de corps et parisianisme et noblesse culturelle / "sélection purement intellectuelle au-delà des classes sociales et des ordres d'enseignement" (97).
. une clé est la différence entre les devenirs possibles dans les différentes disciplines. Lettres, sciences, droit, médecine, et les destins distincts - les places sociales respectives en mutation.
. un point de vue inattendu : le "sentiment sociologique" des individus dans cette histoire - disons ça comme ça, pour pouvoir le penser en continuité avec le "sentiment linguistique" de Saussure. Questions d'identité sociale, d'envies et de rancoeurs et d'énergisations ; expériences de la société. Que Charle mesure par les critères de rémunération, de trajets de carrière dans les champs différentiels du prestige, de la réputation, et de la respectabilité sociale.
. au coeur : le capital culturel, l'annoblissement culturel (et les propositions de Bourdieu). Un rapport, encore à travailler pour moi, du social au culturel au savoir à l'institutionnel au professionnel. Ce noeud, traversé par cette histoire.
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Foucault - post-politique vers : la société
"Il faut défendre la société". Cours de 1976. Toujours la force de relance de Foucault, active now.
Il s'agit d'un déplacement de l'attention - et du travail des possibles dégagés par ce nouvel angle - : de la (philosophie) politique à la société. Déjà un post-politique clair : c'est un après-Marx articulé à Marx (et Weber : l'esprit du capitalisme), et après-XIXème siècle. Passant vers elle à la fois comme départ du trope du droit et de la loi, philosophiques (la souveraineté), et du trope du travail (rapport, de lutte, du capital et du travail), comme point de perspective. Vers l'analyse du pouvoir, comme relationnel. Les relations, soit : ni souveraineté, ni domination (ses binarismes qui forcent les complexités) - mais un système, avec ses solidarités communicantes et ses rouages locaux qui se décuplent ensuite en structures de domination positives. Le passage est donc aussi, en termes épistémologiques, de la philosophie et de l'économie à l'histoire. Ce milieu mobile des forces.
Il s'agit déjà (c'est-à-dire que : les repères du présent sont toujours ceux-là, plutôt, si on veut en profiter pour recaler les chronologies) d'un renouvellement d'une pensée de gauche, au temps même de la bascule d'abord post-staliniste puis post-communiste. L'écroulement graduel des concepts porteurs du marxisme comme mode politique majoritaire (l'un des), et l'état des lieux au fil des remobilisations.
Un post-politique qui ne garde pas exactement vers la culture, comme beaucoup d'autres propositions ont fait (versant postcolonial theories et cultural studies, mais aussi versant conservateur, la Culture et les Humanités pour retenir les dissolutions, historicisations - historiques et théoriques - de l'humanisme), bien qu'elle embrasse avec énergie, en prenant une grande respiration de reprise, toute la matière culturelle de l'histoire et historiographie des nations. Mais vers la société : ses modes doubles, disciplinaire, et biopolitique. Les dressages par les savoirs médicaux (normalisations par cartographie des anormaux et du pathologique), et les politiques de la population, pour un gouvernement, et une vie biopolitique - biopolitique des peuples. Les tropes qui permettent de penser ça : la normalisation, la régularisation, et donc la montée à visibilité des agences des conduites et leurs gouvernements. Les modes de vie, jusqu'aux styles de vie (vers l'étude des "herméneutique[s] de soi").
L'étude s'engage par la société civile (avec celle de l'histoire du libéralisme, comme ce pan aveuglé par la polarité marxiste des regards théoriques - reprenant par Ferguson, le libéralisme britannique, et le néo-libéralisme allemand puis de Chicago : Naissance de la biopolitique), et par, puisque c'est de là que la notion émerge, l'économie politique.
Ces différentes prises : polis, culture, société.
Encore : peuple, nations, races, Etat ["Il faut défendre la société"].
Certainement, la ligne de force ici est la relance d'historicisation. Ce qu'elle dégage.
Le cours est aussi le moment de bascule, dans le travail de Foucault, de l'archéologie à la généalogie comme seconde activité critique. L'érudition et les formations discursives et les savoirs et leurs disciplines : mais aussi leur milieu et leur mobilité stratégiques. Les relations de savoir-pouvoir. Moment épistémologique.
La question reste : les savoirs qui nous gouvernent ; les contre-savoirs que nous mettons en vie.
Il s'agit d'un déplacement de l'attention - et du travail des possibles dégagés par ce nouvel angle - : de la (philosophie) politique à la société. Déjà un post-politique clair : c'est un après-Marx articulé à Marx (et Weber : l'esprit du capitalisme), et après-XIXème siècle. Passant vers elle à la fois comme départ du trope du droit et de la loi, philosophiques (la souveraineté), et du trope du travail (rapport, de lutte, du capital et du travail), comme point de perspective. Vers l'analyse du pouvoir, comme relationnel. Les relations, soit : ni souveraineté, ni domination (ses binarismes qui forcent les complexités) - mais un système, avec ses solidarités communicantes et ses rouages locaux qui se décuplent ensuite en structures de domination positives. Le passage est donc aussi, en termes épistémologiques, de la philosophie et de l'économie à l'histoire. Ce milieu mobile des forces.
Il s'agit déjà (c'est-à-dire que : les repères du présent sont toujours ceux-là, plutôt, si on veut en profiter pour recaler les chronologies) d'un renouvellement d'une pensée de gauche, au temps même de la bascule d'abord post-staliniste puis post-communiste. L'écroulement graduel des concepts porteurs du marxisme comme mode politique majoritaire (l'un des), et l'état des lieux au fil des remobilisations.
Un post-politique qui ne garde pas exactement vers la culture, comme beaucoup d'autres propositions ont fait (versant postcolonial theories et cultural studies, mais aussi versant conservateur, la Culture et les Humanités pour retenir les dissolutions, historicisations - historiques et théoriques - de l'humanisme), bien qu'elle embrasse avec énergie, en prenant une grande respiration de reprise, toute la matière culturelle de l'histoire et historiographie des nations. Mais vers la société : ses modes doubles, disciplinaire, et biopolitique. Les dressages par les savoirs médicaux (normalisations par cartographie des anormaux et du pathologique), et les politiques de la population, pour un gouvernement, et une vie biopolitique - biopolitique des peuples. Les tropes qui permettent de penser ça : la normalisation, la régularisation, et donc la montée à visibilité des agences des conduites et leurs gouvernements. Les modes de vie, jusqu'aux styles de vie (vers l'étude des "herméneutique[s] de soi").
L'étude s'engage par la société civile (avec celle de l'histoire du libéralisme, comme ce pan aveuglé par la polarité marxiste des regards théoriques - reprenant par Ferguson, le libéralisme britannique, et le néo-libéralisme allemand puis de Chicago : Naissance de la biopolitique), et par, puisque c'est de là que la notion émerge, l'économie politique.
Ces différentes prises : polis, culture, société.
Encore : peuple, nations, races, Etat ["Il faut défendre la société"].
Certainement, la ligne de force ici est la relance d'historicisation. Ce qu'elle dégage.
Le cours est aussi le moment de bascule, dans le travail de Foucault, de l'archéologie à la généalogie comme seconde activité critique. L'érudition et les formations discursives et les savoirs et leurs disciplines : mais aussi leur milieu et leur mobilité stratégiques. Les relations de savoir-pouvoir. Moment épistémologique.
La question reste : les savoirs qui nous gouvernent ; les contre-savoirs que nous mettons en vie.
jeudi 12 juin 2008
Agenda - livre noir
Rencontrant BC et EA avec ELB hier, et cogitant autour des modes possibles pour une prise critique active sur les évolutions actuelles, quotidiennes, du front de lutte engageant les disciplines du sens (et leurs diffractions comparatistes dès qu'on met aussi en jeu de "modèle américain" qui se pense par la forme "Humanities") : c'est bien la question du ce qu'il y a à faire, du comment faire, et simplement du faire : la mise en question d'une pratique, épistémologiquement très travaillée mais politiquement délibérément dévalorisée et démaillée étape par étape.
On parler de pamphlet, de livre à rassembler, études des points de vue français et américain (pour faire levier sur le "modèle américain" qui fonctionne comme outil de réforme), pour septembre, de ... On parle de qualité du collectif dans cette entreprise : c'est en effet en soi une prise, politique.
Certainement on peut imaginer un livre noir - entreprise à long terme ; moins un objet, soit un énoncé, qu'un travail, soit une énonciation ; un travail scientifique. Qui peut se faire par, contenir parmi d'autres prises, un travail documentaire : la constitution d'une formation contre-discursive. Un think tank et ses ressources discursives. Le comparatisme y est crucial.
Mais connaître aussi et rendre visible aux résistances éparpillées les plans existants : l'ARESER, les collectifs SLR SLU, et toutes autres entreprises locales. (Organisation : c'est la constitution d'une voix politique, comme collective - et c'est la difficulté de sa constitution qui mesure la force de démobilisation, de désunion, de fragmentation des horizons et perspectives, de l'adverse).
On parler de pamphlet, de livre à rassembler, études des points de vue français et américain (pour faire levier sur le "modèle américain" qui fonctionne comme outil de réforme), pour septembre, de ... On parle de qualité du collectif dans cette entreprise : c'est en effet en soi une prise, politique.
Certainement on peut imaginer un livre noir - entreprise à long terme ; moins un objet, soit un énoncé, qu'un travail, soit une énonciation ; un travail scientifique. Qui peut se faire par, contenir parmi d'autres prises, un travail documentaire : la constitution d'une formation contre-discursive. Un think tank et ses ressources discursives. Le comparatisme y est crucial.
Mais connaître aussi et rendre visible aux résistances éparpillées les plans existants : l'ARESER, les collectifs SLR SLU, et toutes autres entreprises locales. (Organisation : c'est la constitution d'une voix politique, comme collective - et c'est la difficulté de sa constitution qui mesure la force de démobilisation, de désunion, de fragmentation des horizons et perspectives, de l'adverse).
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mercredi 11 juin 2008
Agenda : visées de logomachie
Il y a simplement une pratique de contre-discours à monter, à suivre. Et à afficher ; lui trouver, travailler, une audibilité sociale.
Foucault déplie des histoires locales de tactiques discursives, de dispositifs de savoir-pouvoir. J'approche toujours un peu plus vers comprendre peut-être quelque chose de cette proposition qui a fait masse d'incompréhension pour moi : comment Said pouvait reprendre, dans son développement finalement de la proposition critique (généalogique) de Foucault affadie dans le sens d'un traditionnalisme de "l'intellectuel", la formule du "speaking truth to power". C'est ce que vaut "vérité", et "véridiction" chez Foucault. Speaking truth to power : mon écoute l'incline lentement vers (mais je n'ai pas fini d'apprendre cette écoute, et ni de savoir y résister, comment) : contredire par d'autres régimes de dire-la-vérité ; affaire de logomachie.
S'il y a à hisser les disciplines, actuellement, à hauteur des enjeux du débat dans lesquelles on les précipite (on : la présidence de Nicolas Sarkozy, càd la visée de la construction européenne comme projet du néocapitalisme, et celle de la "modernisation de la France" comme projet de prolongement jacobinisant des grandes dérégulations thatcheriennes ; projet des colonisations capitalistes des externalités publiques, sociales, culturelles, écologiques, biologiques) : c'est pour engager un débat, y insister pour le débat public, processus démocratique. Voix politique. Mais dans un milieu qui n'est pas celui du démocratique politique : ici il s'agit, spécifiquement, du débat scientifique, en tant qu'il y participe ; et en tant que son mode de participation est à réinventer, à re-pratiquer; à instruire à neuf et à catapulter par cette friction - cette logomachie.
Il s'agit donc : non pas d'entrer dans le débat, s'y frayer une place, y crier par-dessus les hauts-parleurs du Discours, mais de développer devant lui un, des, plan/s de discours alternatifs. Contre-discours, et en particulier, pour le concret, deux lieux deux visées : la discursivité cyber, pour pousser dans le milieu des médias ; et la discursivité scientifique, pour pousser contre le milieu de l'expertise.
On peut faire : une analyse scientifique des discours de l'exepertise - certainement, selon la proposition de F. Neyrat à l'ARESER, une sociologie des experts et leurs figures dominantes ; selon la politique critique de l'ARESER, une analyse des enjeux des réformes. Mais aussi un discours de poétique de l'étranger de cette expertise, par exemple : une sciences-de-la-culture des expertises, par exemple ministérielles sur la recherche, et européennes sur l'enseignement supérieur.
La journée de travail Pol-Lab m'aide à tremper cette détermination. Les timidités quant aux engagements de la lutte s'effacent de plus en plus, par la montée d'évidence quant à la nature du champ - professionnel et social, culturel et politique.
Il y a du chantier collectif à imaginer, ouvrir : l'entreprise est politique.
Foucault déplie des histoires locales de tactiques discursives, de dispositifs de savoir-pouvoir. J'approche toujours un peu plus vers comprendre peut-être quelque chose de cette proposition qui a fait masse d'incompréhension pour moi : comment Said pouvait reprendre, dans son développement finalement de la proposition critique (généalogique) de Foucault affadie dans le sens d'un traditionnalisme de "l'intellectuel", la formule du "speaking truth to power". C'est ce que vaut "vérité", et "véridiction" chez Foucault. Speaking truth to power : mon écoute l'incline lentement vers (mais je n'ai pas fini d'apprendre cette écoute, et ni de savoir y résister, comment) : contredire par d'autres régimes de dire-la-vérité ; affaire de logomachie.
S'il y a à hisser les disciplines, actuellement, à hauteur des enjeux du débat dans lesquelles on les précipite (on : la présidence de Nicolas Sarkozy, càd la visée de la construction européenne comme projet du néocapitalisme, et celle de la "modernisation de la France" comme projet de prolongement jacobinisant des grandes dérégulations thatcheriennes ; projet des colonisations capitalistes des externalités publiques, sociales, culturelles, écologiques, biologiques) : c'est pour engager un débat, y insister pour le débat public, processus démocratique. Voix politique. Mais dans un milieu qui n'est pas celui du démocratique politique : ici il s'agit, spécifiquement, du débat scientifique, en tant qu'il y participe ; et en tant que son mode de participation est à réinventer, à re-pratiquer; à instruire à neuf et à catapulter par cette friction - cette logomachie.
Il s'agit donc : non pas d'entrer dans le débat, s'y frayer une place, y crier par-dessus les hauts-parleurs du Discours, mais de développer devant lui un, des, plan/s de discours alternatifs. Contre-discours, et en particulier, pour le concret, deux lieux deux visées : la discursivité cyber, pour pousser dans le milieu des médias ; et la discursivité scientifique, pour pousser contre le milieu de l'expertise.
On peut faire : une analyse scientifique des discours de l'exepertise - certainement, selon la proposition de F. Neyrat à l'ARESER, une sociologie des experts et leurs figures dominantes ; selon la politique critique de l'ARESER, une analyse des enjeux des réformes. Mais aussi un discours de poétique de l'étranger de cette expertise, par exemple : une sciences-de-la-culture des expertises, par exemple ministérielles sur la recherche, et européennes sur l'enseignement supérieur.
La journée de travail Pol-Lab m'aide à tremper cette détermination. Les timidités quant aux engagements de la lutte s'effacent de plus en plus, par la montée d'évidence quant à la nature du champ - professionnel et social, culturel et politique.
Il y a du chantier collectif à imaginer, ouvrir : l'entreprise est politique.
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lundi 2 juin 2008
Théories et pratiques de la valeur : le crash financier
Robin Blackburn publie une longue analyse de "The Subprime Crisis" dans la NRL de mars-avril 20008, orientée autour des termes qui suivent :
C'est bien l'un des points névralgiques, l'un des points d'intensité, là : la valeur de la valeur ; la question de la valorisation marchande des "externalités" ; qui oriente directement sur le rapport économie / culture, comme pôles alternatifs pour deux paradigmes de "société civile" qui ne cessent de diverger. D'où on file vers la question de la valeur du "cognitif" dans le "capitalisme" du même nom, et de celle du "créatif-innovatif". De la valeur des immatériaux. Biopolitique. [voir par exemple les cogitations, chapitre après chapitre, la recherche, reprise et refaite, sur la mesure de la valeur de ces nouveaux produits qui n'en sont pas, dans Advancing Knowledge and Knowledge Management, de B. Kahin et Dominique Foray, MIT Press, 2006.]
La théorie de la valeur imposée par le consensus néolibéral se fissure, avec des effets de destruction immenses, précisément. Malheureusement il n'y pas de maîtres, pour la contrôler, car elle n'est pas un pouvoir. Et il n'y a largement pas à s'en réjouir car elle ne fait rien gagner à la critique, qu'elle appauvrit à sa suite.
"In what follows I interpret the credit crunch as a crisis of financialization--otherwise put, as a crisis of that venturesome 'new world' of leverage, deregulation and 'financial innovation' which Alan Greenspan celebrates in his recent memoir. I show that the pursuit of a market in almost everything led to a banker's nightmare in which key assets could not be valued. I urge that attention be paid to the ideas of Fischer Black, the improbable inventor of structured finance, who warned against 'loading up on risk' when declining to become a founder member of Long Term Capital Management. I evoke both the New Deal response to financial failure and the rise of consumer finance in the postwar world, before considering, in conclusion, what can be done today." (67-68)
C'est bien l'un des points névralgiques, l'un des points d'intensité, là : la valeur de la valeur ; la question de la valorisation marchande des "externalités" ; qui oriente directement sur le rapport économie / culture, comme pôles alternatifs pour deux paradigmes de "société civile" qui ne cessent de diverger. D'où on file vers la question de la valeur du "cognitif" dans le "capitalisme" du même nom, et de celle du "créatif-innovatif". De la valeur des immatériaux. Biopolitique. [voir par exemple les cogitations, chapitre après chapitre, la recherche, reprise et refaite, sur la mesure de la valeur de ces nouveaux produits qui n'en sont pas, dans Advancing Knowledge and Knowledge Management, de B. Kahin et Dominique Foray, MIT Press, 2006.]
La théorie de la valeur imposée par le consensus néolibéral se fissure, avec des effets de destruction immenses, précisément. Malheureusement il n'y pas de maîtres, pour la contrôler, car elle n'est pas un pouvoir. Et il n'y a largement pas à s'en réjouir car elle ne fait rien gagner à la critique, qu'elle appauvrit à sa suite.
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