Much much food for thought from Le Paradigme de l'étranger (M. Espagne, 1993). Sur : la question du savoir-pouvoir, et de la criticité propre de l'étranger, disons ici, comme "paradigme" donc.
En particulier :
. la perspective du "choix disciplinaire" (vers p. 68) (par exemple dans les trajectoires de carrière des individus - cf la méthode prosopographique de C. Charle). Il s'agit bien, dans la discipline comme institution, d'un positionnement, scientifique et social. Identité et statut et fonction, ou "engagement". Avec les "littératures étrangères" - en cours de formation, et tiraillées, tâtonnantes, en fondation au cours mêmes des tâtonnements institutionnels des facultés de Lettres dans le cours long du XIXème - on touche les bords sensibles des questions de disciplinarité : les zones du "subalterne", les discipines "moins considérées" 59, car "encore mal définies" 60. Plateformes utiles pour transitions de carrières etc. (voir les itinéraires des normaliens, non spécialistes).
En quoi subalternes? La présentation jusqu'ici, l'intérêt de M. Espagne, touche peu au point de vue des rapports de pouvoir avec les disciplines à forte légitimité sociale / fort prestige scientifique : comment se placent-elles, institutionnellement, par rapport à la vieille Rhétorique, et aux Littératures anciennes? [Au tout début du processus de création des chaires de Littérature étrangère, la configuration des Lettres est, ou l'une de celles possibles dans le champ : Philosophie, Histoire, Litt ancienne, Litt française, Litt étrangère - 42.]
. mais aussi la modernité (et en ça la nomenclature anglaise fait apparaître, dans son histoire propre que je ne connais pas encore assez, quelque chose qui se marque mieux qu'en France : "Modern Languages") : "Mieux informés du contexte international et notamment de la situation allemande, les professeurs de littérature étrangère font partie des artisans des plus engagés d'une rénovation de l'Université républicaine" 69. Et des réformistes de l'Université après la défaite de Sedan : il s'agit de l'université comme fondatrice de la Nation. L'international, et auxiliairement la littérature étrangère, comme outils de nationalisme. Relation de savoir-pouvoir propre au XIXème.
. mais aussi l'Europe. 39 : comme motivation scientifique interne, et on est ici au temps fondateur de Fauriel et Ampère, avec les horizons philologiques, en tant qu'ils sont aussi une théorie de la culture comme histoire, et de l'épistémologie des langues-cultures comme élément d'une philosophie de l'histoire. On est, certainement, avant de tourner le dos à l'Allemagne et ses inventions des sciences humaines.
Ici c'est la question de l'évolution du "paradigme" de l'étranger vers celui du comparer qui est concerné, qui est aussi celui de l'évolution, bifurcation, de la philologie moderne, une sorte de "Langues modernes", vers les littératures spécialisées, soit la montée de la notion, structurante, d'aire culturelle. Ce processus de dissémi-Nation (Bhabha? faut voir) : de la philologie, globalisante et européenne (mais avec déjà les lignes de tension dessinées par Fauriel cherchant à déplacer le centre de gravité de l'héritage commun de l'indo-germanique à l'indo-européen ; et contrer le modèle de l'antécédente germanique par celui de la littérature provençale, et de la Romania, ombilic des Etudes romanes), vers les spécialisations en nations. Où la rivalité franco-allemande est en jeu actif - créatif, destructeur.
Le processus de spécialisation, qui correspond aussi au développement d'une épaisseur scientifique de la discipline (simplement la production des volumes d'études, chaque fois une orientation, et un terrain), se fait aussi d'une vue génétique générale de l'histoire des littératures, philologique, aux études singulières sur un auteur. Les nouvelles chaires, sous la IIIème République, revenant maintenant à des candidats munis des titres universitaires adéquats (et seulement maintenant disponibles, bien entendu). L'apparition des Langues-et-littératures singulières - anglaise allemande italienne espagnole russe - allant avec ce nouveau mode scientifique : la nation (plus que la culture et ses grands types anthropologiques, peut-être? Par exemple, pour Fauriel après Mme de Staël, le Nord et le Midi), et l'auteur (moins les grandes genèses, plus d'étude textuelle alors? à voir).
. on parle déjà d' "études littéraires" (1896), et la Littérature comparée se différencie aussi, dans une autre bifurcation concurrente avec la gamme des aires culturelles.
mercredi 30 juillet 2008
Littérature étrangère - territorialisations
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