dimanche 30 septembre 2007

RILI : Revue internationale des livres et des idées

Premier numéro de la RILI, donc, pour septembre-octobre 2007. Site : RILI
Un travail de positionnement, soigneux, est lisible :

. "livres" - le concept a une drôle de couleur en français. C'est qu'il est en traduction, de la NYRB, de la LRB, de Bookforum, du TLS (explicitement, affichément).
. "idées" - le terme résonne aussi. Est-ce que c'est mon oreille métèque ?
. l'international est très principalement dirigé vers l'anglophone : Etats-Unis et Royaume Uni. Ce n'est pas forcément assez, mais c'est pertinent.
. parmi les partenaires marqués dans l'éditorial, mais aussi dans les encarts publicitaires : une galaxie : travail de revue : Politis, Vacarme, Multitudes, Radical Philosophy, la New Left Review, le TLS, Courrier international (pas le Diplo ?) Travail d'édition : Amsterdam, Les Prairies ordinaires, Le Point du jour, Verso. Citton et Neyrat, auteurs écrivant ou cité, sont membres de l'équipe de Multitudes.
. autres marqueurs : Yves Citton (qui annonce la publication à la mi-octobre d'un Lire, Interpréter, Actualiser. Pour quoi les études littéraires ?, chez Amsterdam) ; un entretien avec Stuart Hall ("Pouvoir et culture") ; un papier de Thierry Labica sur Jameson, et un second de M. Potte-Bonneville ; un papier sur Michael Scott Christofferson's The French Intellectual Against the Left. The Antitotalitarian Moment of the 1970s ; Jérôme Vidal (directeur de publication de la RILI) sur les intellectuels et le PS ; Perry Anderson sur la London Review of Books, "portrait".
. éléments du projet et de la position éditoriales : "maintenir dans l'espace public l'exigence de penser et l'agir", avec d'autres rythmes et une autre visibilité que ceux imposés par "la lecture-zapping des grands médias" - et "l'espace toujours plus réduit et intermittent" que ceux-ci accordent. Se place "aux côtés des lecteurs, des auteurs, des éditeurs, des revues et des libraires" qui... Sur un modèle explicitement NYRB-LRB etc. donc.
. autres éléments, pour leurs formulations : débat (= mettre "en évidence la dimension politique des savoirs et des idées", mise au jour des positions intellectuelles et politiques existantes ou émergentes"), critique (consacré aux travaux critiques : soit, "qui viennent troubler les savoirs établis et mettre en question les imaginaires sociaux et politiques"), actualité ("intervenant dans le débat public", et "portant sur l'actualité un regard décalé et contribuant à la redéfinir"), transnational (recensions de livres non traduits, contributeurs étrangers, attention particulière aux traductions), ouverture sur la scène littéraire et intellectuelle -
. note : littéraire, ici? Le centre de gravité semble plutôt la théorie, les disciplines, les "savoirs et les idées". L'intellectuel et le politique. Peut-être tirant vers "theory", dans l'éloignement justement de la question du littéraire ?

. trace, aussi, d'une ligne de front que je n'avais pas repérée : la New Left Review contre Foucault et contre Nietzsche - la ligne marxienne, donc, par contraste ? Un encart annonce : "NLR. Contre-pensées contemporaines - poilitiques, culturelles, économiques. Ce que vous n'y trouverez pas : Révérences à Michel Foucault, Regrets pour Kyoto, Petits conseils au State Department, Eloges du box-office, Euphémismes à propos de l'ONU. Ce que vous y trouverez : Pouvoirs ("Etats-Unis, Europe, Chine, Moyen Orient, Japon" - intéressant, Europe, de la part d'une voix britannique), Marchés, Arts ("avant-gardes, franc-tireurs, cinéma du Sud") , Idées (déclinées en : "anti-Nietzsche, postmodernité, utopies, multitudes"), Mouvements ("contre la guerre, Sem Terra, paysans Chinois").

. enfin, à noter : l'ouverture d'une collection Penser/Croiser, dirigée par François Cusset, aux éditions des Prairies ordinaires. Premiers numéros, entre autres : traductions de La Totalité comme complot (F. Jameson), et de Quand lire c'est faire. L'autorité des communautés interprétatives (S. Fish, traduit par Etienne Dobenesque). C'est du travail important ; il faut le connaître et le suivre. Le tropisme actuel de la traduction, à son plus culturellement créatif.

samedi 29 septembre 2007

La traduction de B. Cassin

Just this : "A présent, traduire engage." L'Effet sophistique, p. 345.
Un sujet par la traduction (un mode de subjectivité, trans-subjectivation, précisément) ; un politique dans la traduction ; et le temps philologique quand la philologie est la logologie telle que le logos repensé dans l'effet sophistique : actualisation (Aristote et Arendt, qui passionnent aujourd'hui), "création continuée" du "consensus sophistique".

Histoire de la culture

La culture change, mais surtout : la culture change.
Dans les années 60-70 avec Bourdieu, on a parlé sociologiquement de la culture, comme marqueur de distinction et distributeur des classes sociales. Culture dominante, et donc - pour les cultural studies du Centre de Birmingham par exemple - la culture populaire. Insister sur l'existence active et fructueuse de whole ways of life, en travaillant à distinguer théoriquement la pensée de la culture du seul modèle, dominant-oblitérant, de la high culture. Théoriser la culture comme le processus de vie d'une société, ici et maintenant - y compris en refaisant à ce point de vue toute une histoire du rapport Culture and society dans la culture anglaise.

Sur un autre plan, traversier, dès l'après-guerre, parlé de culture de masse : l'Ecole de Frankfort exilée aux Etats-Unis : choc des cultures, pour le moins -- et déracinement des repères pour une définition de la culture comme fabrique de société. La question de l'art y joue un rôle critique, un peu douloureux. Indice de catastrophe.

La "culture" a encore changé, est de nouveau méconnaissable, parce que les plans sociaux où le concept fonctionnait ont basculé, se sont recomposés, nouveaux clivages, nouveaux champs de tension et de vie, nouveaux champs de la valeur - géométrie variée. La "culture populaire" n'est plus, par exemple, en France, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni singulièrement puisque c'est de là que la notion-nation émanait le plus nettement [il faudrait voir dans l'histoire allemande - certainement beaucoup de matière là ; une histoire spécifique intensément éclairante pour le général], la culture populaire n'est plus donc une catégorie qui a la pertinence analytique forte qu'elle avait dans les décennies -- les décennies quoi ? Il faut sans doute dire : d'après-guerre et jusqu'aux années Thatcher, soit les décennies des socialismes démocratiques, des welfare states, des syndicats et de la validité politique du marxisme, des intellectuels ("de gauche") ? Certainement ça vire dans les années 80, avec Thatcher Reagan et le tournant libéral du socialisme français.

Mutations de la culture, mutations de la notion même de culture. Paramètres actuels : d'abord les cultures, et le multiculturalism (le postcolonial, relayé par la mondialisation - les deux comme effets de la fin du modèle Guerre froide de la géopolitique : non-alignement, et idéologie). Puis "exception culturelle" : la culture et la valeur commerciale-et-transnationale (le néo-libéralisme est une géopolitique ; la culture est nécessairement bousculée par le drainage soudain de la validité sociale du national, paradigme de la culture pour les sociétés européo-américaines depuis le 19ème). Puis la cyberculture, liée au produit culturel communication* (mais distincte de lui, et à garder telle pour continuer à sentir l'enjeu d'un départ entre forme ou dispositif, et système de la valeur : ce n'est pas le cyber- qui est destructeur de social, mais une idéologie qui s'est accolée à ce medium. Il est aussi puissant de créativité). Puis ... il y a d'autres formes et pratiques actuelles, qu'il faut continuer à rassembler et auxquelles je ne pense pas dans l'immédiat.

C'est dans cette perception des mutations de la culture qu'il faut lire et évaluer le trope, le thème, le cheval de bataille actuel, de la culture générale. Par exemple lisible dans la Lettre aux éducateurs de la première rentrée de Sarkozy, et balisée avec confiance par Le Débat. La culture générale en particulier mise en regard des "cultures lycéennes" (Dominique Pasquier, rapportant certaines analyses aux échos tocquevilliens de son Cultures lycéennes. La tyrannie de la majorité, Autrement, 2005, dans le Débat de mai-août 2007), le "décrochage culturel" (Pasquier), les "jeunes" qui mettent à mal la culture comme linchpin de la république - par la diversité communautariste, par consumérisme de masse et addiction à la communication.

Quel état de la société, des sociétés, ça donne à voir, à analyser, diagnostiquer éventuellement ; et quelle prise critique sur une idéologie par la culture, par un discours sur la culture, ça procure à une poétique qui tient le plan de l'histoire des concepts.

* je laisse ça à déplier pour une autre fois. Juste un jalon ici.

vendredi 28 septembre 2007

Communication et traduction

J'essaie de reprendre le fil, trop laissé à refroidir, de la discussion ouverte, disposée, par Brossat et Déotte, d'abord en université d'été puis en séminaire à la Maison de l'Europe à Paris début septembre 2007, sur "Traduire entre les cultures : affronter le différend".
Beaucoup apprécié l'initiative, et ses réalisations : l'ouverture d'un tel champ de travail, sur des voix nombreuses et soigneusement internationales (Europe et Extrême-Orient comme orientation centrale), dans les formes d'un réseau (Darmstadt, Porto, Haïti, Taïwan, Chine), puis d'une université d'été, et avec un nouvel ancrage à la Maison de l'Europe, lieu public lieu ouvert (selon la politique de sa présidente Catherine Lalumière), et lieu des travaux du programme Culture et politique / Transeuropéennes / séminaire au Collège international de philo (Ghislaine Glasson-Deschaumes, Rada Ivekovic).
Le projet est annoncé par la formule de Brossat : une machine de guerre, contre-courant à une idéologie massive de la communication et du consensus ; un "discours d'époque" et "discours dominant" promouvant/se donnant comme un "dialogue entre les cultures" qui chante la tolérance, l'ouverture, l'universalisme, l'homme, l'entente, compréhension, le tout-circulation et l'interculturel bien-(mal)-pensant - en faisant fonds d'une pensée autoritaire du rapport entre culture et politique. Contre le "dialogue", le différend (Lyotard / avec un écho à la Mésentente, Rancière) - l'analyse établit une autre distinction qui sous-tend cette première : contre le consensus, une pensée du politique-langage comme dissensus.
Eléments du dispositif :
. un point de départ dans la question de la guerre civile. Stasis et polemos.
. Transeuropéennes critique des discours identitaires : répondre au discours dominant qui organise le champ politico-cutlurel en termes de dialogue des cultures mais du coup aussi choc des civilisations. "Traduire entre les cultures" semble être un énoncé émanant de cette voix (un n° de Transeuropéennes, portant comme titre déjà "Traduire entre les cultures", était paru en 2002), le dissensus venant des philosophes. Première note, pour moi. Deux points de parole, que distingue une perspective : philosophique (états du politique), et culturelle (états du langage). Pour Transeuropéennes : la traduction comme méthodologie pour une réflexion sur les cultures.
. une cible précisée : l'éthique communicationnelle d'Habermas, prise en mire par Le Différend (1982).
. Déotte présente le concept comme gagnant une pertinence de plus dans "notre situation postcoloniale".
. Déotte engage aussi "artistes et penseurs", "en première ligne" - je n'ai pas saisi, dans la vitesse, en quels termes ça se fait pour lui. De même, Brossat évoque le Rushdie de l'époque de la fatwa, en contraste avec l'affaire des caricatures de Mahomet - en tant qu'elles ont, marque d'un temps plus récent, instantanément fait passer du local au mondial. Cette fenêtre sur l'art et la culture.

Questions et relances :
. la traduction culturelle - et sa généalogie et ses interlocutions avec la cultural translation. Qui ne désigne pas - car "à présent la traduction engage", écrit B. Cassin (L'Effet sophistique, p. 345) la même chose ni le même plan de problèmes. Il faut faire entendre ces voix, dans leur dialogue - oops, leurs rapports critiques -, distinctement.
. l'entrée de la question postcoloniale dans le champ de la philosophie française - et plus largement, mais c'est certainement autrement chaque fois, dans les sciences humaines. Voir également ce qui se passe dans la traduction engagée de postcolonial, et ses traditions conceptuelles discursives et politiques maintenant longues de plusieurs générations théoriques, en "postcolonial".
. au différend, à la mésentente, et leurs effets de relance par la question de la traduction telle qu'engagée ici, on peut aussi faire parler l'homonymie - telle que conceptualisée par B. Cassin à partir d'Aristote (limite du philosophique et de la sophistique) : une proposition quant au rapport du politique au langage, et une proposition qui fait bouger les piliers philosophiques des cultures européennes. Met la philosophie à la question, du langage. Par l'usage de la traduction, machine de guerre philologique-logologique, et intimiment liée à la question du texte, de l'oeuvre, de l'art, de la littérature. Le rapport philosophie - philologie est mis en tension sur le champ même du politique. Une mise en tension du politique.

Mais ma question focale : touche à la fonction du langage, tel que convoqué dans le champ critique ouvert ici. La traduction contre la communication : my heart leaps. Mais il semble manquer quelque chose à la structure de l'argument ; une question s'éloigne, en emportant avec elle le concept bandé pour l'assaut ou la résistance mêmes. S'il s'agit de prendre à revers, par une analyse rebroussante, la communication comme bloc idéologique et idéal d'une certaine articulation entre une certaine discursivité et une certaine socialité, il faut que les propositions répondent sur l'articulation : il faut que l'attention se porte bien sur la traduction comme pratique du différend : pas seulement un contre de l'irénisme-autoritarisme consensuel (question de philosophie politique), mais bien sur une pensée du langage dans lequel il est tressé. Un modèle alternatif du rapport langage-société. La question est alors : quelle repensée du langage est en travail dans le concept de traduction ici ? Et quelle repensée de la philosophie, par là-même ?
Soit : en quoi cette machine de guerre est-elle philosophique, spécifiquement, et non seulement, disons, "politique" ? Qu'est-ce exactement que le concept philosophique de traduction ici ? Comment fait-il, philosophiquement, une pensée du langage qui réponde à la nécessité politique observée de penser le différend ?
Que fait la philosophie, ici, en tant que telle, comme intervention dans le politique - soit, dans les termes culturalistes de la vie (géo-)politique contemporaine ? (Brossat dit, ici : "culture" devient le terrain du différend. Ces termes sont exacts, pour moi. Culture et non, par exemple, dit-il, religion. "Hyper-politisation, hyper-idéologisation, de la culture même". Oui. De même, nous prenant en pince par l'autre côté : les politiques de la culture, instrumentalisation de la culture pour la droitisation : voir Manière de voir, Les Droites au pouvoir, oct-nov 2007)
Brossat propose : un travail philosophique, contre un discours d'époque (clichés de la société liquide, du métissage, etc. - mais l'actualité des envenimements des différentiels, et la banalisation du différentiel). Travailler l'envers d'un discours d'époque, par la philosophie. Physionomie d'un défi actuel : penser le statut du différentiel, pose-t-il -- certainement, et les termes proposés sont bien acérés ici en effet. Mais : "passer par la philosophie", pour une "lutte féroce contre le monde de la communication", et son "habermassisme de bazar" (prenant éventuellement, opportunément, internet pour modèle et emblème, du tout-compatible). "Un courage philosophique maintenant", certainement. La philosophie a à répondre dans l'actualité ; c'est parce qu'elle le peut qu'elle est pertinente, et fait culture. Mais la spécificité de son travail, là ?
Quelle philosophie de la culture comme altérité ? En quoi la philosophie philosophise la culture comme les cultures, contradictoirement à la Communication, et par la perspective langagière de la traduction ?

La question est cousine de celle que je me pose aussi, comme chercheur en littérature étrangère, au sujet du concept de cultural translation, qui lui met en jeu d'autres discours disciplinaires, soit d'autres plans où se pensent l'actualité du rapport langage-société : cultural studies, anthropologie, etc. Ici aussi, la question du langage au coeur de celle de la traduction a cette tendance à l'effacement - une tentation facilitée en anglais puisque translation, dès les débuts de sa conceptualisation pour la postcolonial theory, a ouvert la possibilité de confondre les plans du langage et de la vie des sujets (avec la notion de "translated men", que Bhabha reprend à Rushdie). Ce continu théorique ouvert est une grande force critique contemporaine : mais seulement si il tient bien ensemble les deux plans pour former un "bloc", au sens de Deleuze - agencement collectif d'énonciation qui fraye des lignes de fuite précieuses dans la muraille de l'idéologie communicationnelle. Sinon le risque est simplement de voir se recomposer le sujet autonome, prêt au "commun" du sensus communis.

mercredi 26 septembre 2007

Action, oeuvre, travail

Croisé ce matin une intuition remarquable, petite percée à la B. Cassin, capable de frayages au long cours, c'est-à-dire ouvrant du devenir ; coup d'historicité : à propos des lectures des Grecs (soit, du rapport entre philosophie et politique) faites par Heidegger d'une part et, très-s'écartant, par Arendt d'autre part : "Qu'il doive s'agir en politique de penser le jugement à partir du goût [le goût dans son mode sophistique : non pas celui de l'arbitraire subjectif, mais celui de la persuasion, création continuée du consensus], pose de manière aigüe le problème du rapport entre esthétique et politique, entre l'oeuvre et l'action dans la cité". (L'Effet sophistique, 263) Symptomatiquement, Heidegger choisissant d'étudier la poésie tragique de Sophocle, Arendt la prose historique de Thucydide.

Action et oeuvre ; vie politique (et participation à la décision politique) et vie culturelle, vie du sujet dans la discursivité. Un continu qui tire loin des pièges classiques qui séparent en pinces tendues le philosophique et le politique, le penser et le faire, l'intellectuel et la société.
C'est qu'il y a, pour commencer par là, plusieurs modes de l'intellectuel : le sophiste n'est pas le philosophe. Et c'est pour ça même que la philosophie n'est pas le tout de la pensée. Il y a cette détotalisation à faire, patiemment, continûment. Tenir la philosophie dans ses propres trajets, et ne pas les confondre avec le terrain. Tenir la philosophie dans son plan conceptuel et dans son histoire, en ce qu'elle contribue à tenir cette extopie de la pensée ; qu'elle l'effectue.
L'oeuvre, comme activité (c'est le terme chez Meschonnic, pour montrer simplement le passage de l'oeuvre-objet à l'oeuvre-transsujet) ; comme action (praxis - à voir) ; comme travail.
Il y a beaucoup à déplier ici. L'oeuvre, comme point de vue depuis lequel reconsidérer l'action, et le travail. Tous deux, d'ailleurs, pris dans une actualité à plusieurs niveaux de profondeur : immédiate et pas vraiment anecdotique(l'hyperactivité comme politique), et en point d'orgue sur du mouvement lent (les mutations du travail, y compris par les nouveaux rapports du travail avec le savoir).

Industrie de la valeur - l' "évaluation"

Je découvre graduellement, mais dans sa vitesse un peu sidérante, une immense activité de production de la valeur, et de systématisation d'un mode de la valeur - soit, la consolidation diligente d'une idéologie -, qui concerne directement les chercheurs, enseignants ou non (mais est très mal diffusée auprès d'eux - il y a tout un système d'opacité, spécifique, qui en est le contexte mais aussi l'outil. La sidération est une mise au silence, aussi). Concerne directement les acteurs nationaux du savoir, sa fonction publique. Une industrie, technocratique mais regardant vers le privé, comme beaucoup de la technocratie actuelle (européenne par exemple), de la valeur du savoir, avec ses divers modes, organes, lieux, responsables, affiliations ; et ses allégeances qui mélangent les genres.

L'évaluation, outil politique agressif, et destructeur en profondeur. Crible par lequel les universités (et le CNRS) sont contraintes à passer, pour en ressortir transformées du (presque) tout au tout, et le rapport de la société et du savoir remodelé. Le rapport signifiant méconnaissable. On appelle ce processus diversement Europe, ou mondialisation. Ou modernisation. La modernité de la connaissance, et son Brave New World.

Les agents, les modes, les formes de cette industrie sont à connaître et à analyser soigneusement, dans le détail. Les enjeux y sont partout bien saillants, et partout déterminants. Je retiens en particulier l'existence et l'espèce d'énergie affamée (on connaît ces dévoreurs depuis plus longtemps dans le secteur du business - ici l'énergie semble venir simplement d'un bon vent en poupe venu des gouvernements successifs dans la logique de l'Europe-connaissance) d'un nombre remarquable d'organismes, au statut trouble, précisément. Statuts entre-deux, et opérateurs de mélange du public et du privé. Bascule de la valeur, toujours plus de domaines de la valeur (ici maintenant, la valeur sémantico-scientifique), dans la logique du privé. Statut, et outils, qui technologisent la valeur. Ce sont les lieux actuels de la valeur de la recherche et du savoir : lieux où elle se négocie socialement et se détermine. Organes, ou machines, de la légitimité. Question, alors : la légitimité de ces légitimeurs?

. OST : un Observatoire des Sciences et Techniques (naissance 1990), groupement d'intérêt public de droit privé (statut caractéristique, créé en 1982, et que je rapporte pour ma question à cette autre forme privatisante d'organisation du savoir, le think tank), a mission ministérielle pour fabriquer des outils, indicateurs et mesures bibliométriques, pour l'évaluation de la recherche.
. WOS : Web of Science (outil commercial, de l'éditeur Thomson. Son slogan/logo : "Transforming Research". Quite). C'est l'un des cribles, et l'un des produits de ce système de la valeur, lui-même outil immensément puissant pour en propager le réseau. Par lui qu'on veut être déterminé, qu'on veut déterminer le système de la valeur scientifique. L'Europe cherche à s'y accrocher en demandant une fusion des revues indexées par ERIH : European Reference Index for the Humanities (tel que présenté par exemple sur le site web du Arts and Humanities Research Council britannique) Extrêmement intéressant, les listes et classements produits par ERIH - on attend avec impatience celles qui concernent les disciplines non encore processed.
. puis : les producteurs d'indicateurs mis en place dans l'institution scientifique par les politiques de la recherche récentes : AERES, pour nous principalement. Avec le Research Assessment Exercise (intéressant que l'organe ne se désigne que par son processus), le Royaume Uni a fait son système depuis longtemps : sans doute il est en perfection continue de ces outils de la nouvelle valeur : http://www.ahrc.ac.uk/about/ke/evaluation/quality_assessment.asp

. autres aspects : les indicateurs ont vocation comparative. C'est l'ouverture d'un plan conceptuel-idéologique pour la league table et la compétition moins internationale que mondialisée : transtionale, précisément. Où la question de la nation et des nations tombe. Un comparatisme qui verse vers la compétition.
. des questions soulevées au passage de ce rouleau-compresseur : le rapport entre évaluation et expertise (indicateurs / collectifs publics de pairs ; "représentativité" par quantification / représentation démocratique) ; le rapport entre "impact" (as in impact factor) et valeur ; le rapport des sciences "dures" / "humaines" (déjà classique, mais aussi changeant de valeur culturelle à toute vitesse) ; le rapport de la recherche à la publication ;
. les mots de l'évaluation (mots d'ordre, "vocabulaire", mots de bois) : impact factor, esteem indicators, indicateurs, les chercheurs "actifs" et "publiants", research environment, research output (interesting symptom), performances, ...

Evaluation (soit : le formatage de la valeur scientifique et de la valeur sociale du scientifique par ce paradigme - un bloc de savoir-pouvoir), et knowledge management.
Ce sont des éléments clés de la nouvelle dispensation pour la question de l'intellectuel, et du travail intellectuel, ici maintenant.

dimanche 16 septembre 2007

Société de la connaissance

Quelques premiers repères :

. le Rapport Lévy-Jouyet (2006), sur l'économie de l'immatériel (Védrine aussi le cite, dans son propre Rapport pour le Président de la République sur la France et la mondialisation, sept. 2007)
. la "stratégie de Lisbonne", comme point d'attache du discours de l'UE : faire de celle-ci "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d'ici à 2010, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale."

. mots clés et enjeux : NTIC, société de l'information migrée en société de la connaissance, économie post-industrielle ; (économie de, soit capitalisation de, et appropriation de) la connaissance, le savoir, le savoir-faire, l'immatériel (et le tertiaire et les services), les actifs immatériels (comptabilisés dans la LOLF, et régulés par l'APIE : Agence du patrimoine immatériel de l'Etat, créé en 2007), la propriété intellectuelle (quelles nouvelles synonymies idéologiques là, et ce qu'elles rendent inaudible par rhétorique d'amalgame), passage de la dyade marxienne travail + capital à un dispositif en 3 : y ajouter un "capital-savoir" ou "valeur-savoir" (et un déplacement du concept de patrimoine), l'intelligence économique (what the f* ?), la gestion ou ingénierie des connaissances (knowledge management, voir Jean-Yves Prax : Le Guide du knowledge management, concepts et pratiques du management de la connaissance, Dunod 2000), humain, sémantique, idées [je n'ai pas trop trouvé : "symbolique", "marché des biens symboliques"], la politique des pôles de compétence et compétitivé ("cluster") - mais aussi l'écologie, le durable, la politique du numérique (gouvernance d'Internet et patrimoine informationnel)

J'ajoute : l'exception culturelle. Les sciences cognitives. Le "cerveau global" (what the f* ?)].
Ca tire parce que ça tend ensemble les activités marchandes et les activités des autres systèmes de la valeur. Culture.
Et parce que : le collectif et le privé. "Patrimoine" dit ça, par exemple.
Politique de la valeur, donc.

Titres recueillis dans divers articles de la vox populi Wiki :
. Nicolas-Le Strat. Mutations des activités artistiques et intellectuelles. L'Harmattan 2000
. Azaïs; Christian et al. Vers un capitalisme cognitif : entre mutations du travail et territoires. L'Harmattan, 2001.
. Groz, André. L'Immatériel. Galilée 2003.
. Moulier Boutang, Yann. "Le capitalisme cognitif. La nouvelle grande transformation", Multitutes/Idées, Amsterdam, 2007.
. Patrick Dieuaide sur la Politique des savoirs, dans Ecorev'. (2004)
. et Docforum, association lyonnaise, travaille sur l'économie du savoir, l'intelligence collective, et la gestion des connaissances.

samedi 15 septembre 2007

Question de traduction : néolibéralisme

A néolibéralisme, répond the corporate world, dans le contexte américain.
Ce sont deux histoires du "libéral", et de la liberté.
A leurs frictions, il y a beaucoup à continuer à comprendre, pour entrer dans. Dans ce qui est plus qu'un avenir ;- un "irrépressible", qui détermine une urgence, dans le mode de l'analyse que Tocqueville de la nouvelle temporalité de la démocratie.
Valeur du néo, ici.

jeudi 13 septembre 2007

Poème de la pensée, poème-vie

Novalis ("Monologue", et "Fragments logologiques" - autour de 1798), relu par Barbara Cassin qui le fait relire Heidegger (qui le commentait dans "Le Chemin vers la parole", sa dernière conférence, 1959) en retour : "Ce que sont à la logologie les philosophies qu'on a faites jusqu'à présent, les poésies qu'on a faites jusqu'à présent le sont à la poésie qui doit et qui va venir [...] La logologie amènera avec elle la révolution nécessaire". L' "anecdote", et le "roman", en seront des modes. La poésie, commente Cassin, "gaiement comprise à la Nietzsche comme 'le grand art de la construction de la santé transcendentale', qui 'se joue et dispose à son gré du déprimant et du tonique, du plaisir et de la douleur, du vrai et du faux, de la santé et de la maladie". Un peu plus loin : "Ce pouvoir critique d'ou découle la plus moderne des forces de vie : 'Philosophister, c'est déphlegmatiser -- vivifier'." (L'Effet sophistique, pp. 115-116)

Point : que Cassin prend comme jalon ces concepts-poèmes, ces mots poétiques-mots théoriques, de Novalis : logologie, philosophister. Et fait tourner tout l'Effet sophistique - critique du logos interprété comme le rapport de vérité être-dire, et, je l'attends l'espère pour plus loin dans le volume, critique du logos logique de much of la philosophie analytique - sur leur crux.

Politique de la valeur #3

Le truc c'est, simplement : l'université produit de crée de la valeur. C'est ce qu'elle fait. Sa "mission". Un travail culturel - et, éventuellement, de modernité.
(ou, tout autant, de conservatisme - c'est la question qui est là. Les répondants s'organisent diversement, historiquement, circulent, rayonnant une ambiance des idées).
Après, c'est simplement la guerre des systèmes de valeurs. Plans de valeur.

Un exemple de "sciences humaines" pour ELB : Anne-Cécile Robert sur le discours de Sarkozy à Dakar (26 juillet 2007), dans le Diplo de septembre (p. 32) : "Cinquante ans de travaux scientifiques semblent échapper au président français, notamment ceux de l'historien sénégalais Cheikh Anta Diop (dont l'université où il prononce son discours porte le nom), mais aussi, entre autres, ceux du sociologue George Balandier ou de l'historienne Hélène d'Almeida-Topor", sur la "modernité des sociétés africaines. [by the way : l'université de Sankoré, dans l'actuel Mali, comptait 25 000 étudiants au 16ème siècle ; les manuscrits de Tombouctou ; etc.]
Le rapport de Sarkozy à l'histoire est un terrain d'évidence. Terrain pédagogique. Presque : de vulgarisation.

mardi 11 septembre 2007

Situation des universités - sept. 2007

Un petit dossier intitulé "Derrière l' 'autonomie des universités' " dans le Diplo, qui met en regard, selon le trope - majoritaire comme critique, deux faces d'un même problème - ordinaire, la situation française et la situation américaine, avec l'Europe comme déclinaison d'une gradation entre les deux. Donné à lire également, depuis les deux points de vue, comme pente de l'avenir français.

Christopher Newfield annonce la sortie prochaine de son The Post-industrial University. The Culture Wars and the Unmaking of the American Middle Class. 1980-2005. Beaucoup de code ici, à entendre. Par exemple, le fait qu'il réveille des tropes conservateurs - il n'y avait plus guère que Bill O'Reilly, il me semblait, qui disait encore "culture wars" ; et "unmaking" harks back to Allan Bloom, was it? (no it wasn't quite - vérification faite : The Closing of the American Mind, 1987.)

B. Cassen lit The Trouble with Diversity : How We Learned to Love Identity and Ignore Inequality. Metropolitan Books, NY, 2007, de Walter Benn Michaels. Intéressant de revoir ce nom faire surface - après avoir aussi réentendu celui de son compère Steven Knapp dans le relevé de la théorie littéraire contemporaine qui prend effectivement en compte la question du literary, par Culler (2007). Knapp & Michaels, initiateurs du backlash "Against Theory" (1982), et acteurs à nouveau, 2007. 25 ans. Le livre, tel que le fait lire Cassen, est dans la ligne bien reconnaissable de l'anti-théorie, qui a des choses à dire sur la gauche liberal et une doxa critique universitaire. Dès qu'il est lu par un regard français, sont mises en relief les différences de contexte, où la question qui émerge est celle de l'institution - structures sociales du savoir-pouvoir. Ici, on s'engouffre dans la question de la culture et des cultures, du "multiculturalisme" et du relativisme, de la valeur et des valeurs sur leur plan culturel. La littérature, et les disciplines de la littérature, poétique et Theory (et l'historicisation introduite par les "post-structuralists"), y sont engagées.

Quelques points de repère :
. le lieu du critère, le diplôme de référence : le MBA (et la transformation de Science Po et de l'ENA en "business schools"). Journal du Management, et Financial Times.
. "impact factor" - critère calculé sur la visibilité internationale (anglophone) dans les revues
. concurrence, valeur, valeur sociale, valeur d'une université. Valeur dans un système économiste / valeur dans un système concernant la formation des étudiants (et non la satisfaction de clients, faisant un investissement éducatif)
. "économisme" - et du coup "darwinisme éducatif" (mais il ne s'agit justement pas d'un processus naturel, NB).
. en Allemagne : programme de Excellenz-Initiativ - voir le sort des établissements de sciences humaines là
. conclusion de Charle : "Ainsi, on ferait coup double, supprimant un des derniers espaces critiques de l'ordre établi [what's that exactly though?] et légitimant une fois pour toutes des fractures sociales grandissantes".

Une bibliographie choisie, à noter. Pour la France et les Etats-Unis.

lundi 10 septembre 2007

Politique de la valeur - suite

Compagnon, la valeur, la modernité - suite.
Je repense au titre de la Leçon : La littérature, pour quoi faire ?
Puts me in mind of John Carey's What Good Are the Arts? (2005, Faber). Le contexte n'est pas le même, mais il y a des rapports à faire.
Le CS de Paris 8 lançait l'an dernier un programme de colloques sur 3 ans, sur : "A quoi servent les Sciences humaines et sociales ?" (le graphisme décalant le point d'interrogation, un peu poussivement peut-être ?, pour qu'il mette en question la question elle-même)
Quelle injonction, et comment répond-on à une injonction de cette sorte.

Le "à quoi" (la syntaxe oriente déjà, vers l'objet et détourne le regard des processus subjectifs - la Bildung par exemple), le "faire" et le "servir" (pragmatisme et utilitarisme programmés là, identifiables, et lançant des trajectoires de possibles également identifiables avant de partir), sont des modes de la valeur.
La question commence ici : quels choix sont déjà idéologiquement opérés quand on a orienté le regard dans ces termes.
Oui la valeur. Quel mode pour elle. (Et non : laquelle).

Kampfplatz

Le mot, avec l'histoire qu'il a dans son sillage, m'intéresse. Je le trouve dans Chiss & Puech, Le Langage et ses disciplines, en simple allusion. Le seul fil que j'en retrouve pour le moment est chez Kant, le « Kampfplatz der Metaphysik » dans la Critique de la raison pure.
(Il semble que ce soit pour désigner une mauvaise criticité ? Pour en sortir une corrigée, relancée.)

Critique, culture

Pas besoin de la bataille même. De s'y prendre au sérieux. "Engagement", et même "critique" (dans son histoire culturelle, littéraire et philosophique et/puis politique), sont des modes du, non le, travail même.
Les noeuds de conflit comme repères du critique, les lignes de conflictualité, sont des ressources sûres. Mais ce n'est pas la bataille qu'il y a à chercher - mais simplement le vivant et la possibilité du vivant (la vie, comme dans le langage - Benjamin), le présent, le travail culturel. La lutte est un mode. Une pratique ; qu'on ne choisit pas - parce qu'on ne choisit pas.
Ce dont il s'agit, c'est : le travail culturel. Ou : "la vie des peuples" (Saussure). Et prendre les lignes de fuite, les faire puisque ça presse, de la modernité. Pratiquer leurs brèches.

De "critique" à "culture", il y a régression politique seulement selon une conception de la culture. L'enjeu qui est là. Certainement le mot a une histoire conceptuelle et axiologique complexe, ambivalente si on la voit comme un tout - droite et gauche. Mais : le vivant décoché par la notion saussurienne de la vie des peuples. Qui fait de la linguistique générale une "science historique et critique".

Je crois que j'entends "Multitudes" - et l'énergie deleuzienne pour une socialité moléculaire, sur laquelle fait fonds (ou trajet) le collectif de la revue autour de Toni Negri. On peut aller travailler avec ça.
Deleuze aussi va vers "vie". (pas, à mon souvenir, vers "culture" ? "Culture" y est-il seulement mis au compte du territoire même ?)

En jeu : la politique de la valeur

Oui, un gros chantier ouvert actuellement en France dans le monde, de "revalorisation", réévaluation, réinvention des systèmes de valeur ; s'arracher à des repères soudain (ou pas si soudainement, mais ils ont les effets persistants) obsolètes, et valuer maintenant, pour maintenant. Un gros chantier culturel ; une modernité presse. C'est pourquoi il importe, et c'est le seul travail nécessaire effectivement, de distinguer modernité et la "modernisation" dans laquelle le discours dominant cherche à la canaliser ; et de bien entendre, tranquillement et dans toutes ses "conséquences innombrables" (Saussure, et le temps critique donc), la différence entre la valeur et "les valeurs". Contre l'offensive évidente d'une morale (dont : les bonnes manières - voir les symptômes culturels de ça, bien inscrits dans la culture de la télévision M6 -, la culture générale - voir le Kampfplazt bien localisé de ça, dans Le Débat -, etc.), pour dépolitiser ; gagner par là l'affaiblissement des oppositions. Leur long feu.

Le travail philologique de Barbara Cassin (entre Google-moi et L'Effet sophistique) se construit ("s'instruit", précisément : c'est son mot et outil méthodologique - le travail se fait par la re-lecture des textes, et les conflits ainsi levés dans l'histoire des traductions et des interprétations) comme une pensée de la valeur, contre une orthodoxie de la morale. Philosophique d'abord - les allusions de l'introduction de L'Effet sophistique sont encore pour moi à décrypter (le cryptage lui-même est à interroger, soit à valuer, dans le travail discursif fort, marqué comme discursif, que fait Cassin : "logologique", dans et par, ben oui. Elle écrit "simplesse", je m'autorise "valuer". Quittes.) Les allusions de l'introduction, donc, pointent vers la morale comme ambiance culturelle (quels lieux de ça?), et vers la philosophie analytique, et les politiques du communicationnel qu'elle légitime.

Donc, très simple, la distinction à tenir, continument, tandis que les discours se déroulent en politiques : entre les valeurs et la valeur. La bêtise conservatrice de penser valuer en bloquant les valeurs, sur un état qui perd de sa pertinence, se vide de vie et de vitalisant, au fur et à mesure qu'il est consolidé, prothésé, rempiété. On dit aussi : durcir.
Bêtise des défenses, de toutes natures.
Celle de la littérature, pour Compagnon qui appelle, depuis sa chaire au Collège de France, à sa défense et illustration. Geste de très piètre modernité. La modernité est bien le problème de Compagnon (voir Les cinq paradoxes de la modernité, puis Les Antimodernes, et la place qu'il donne à la modernité dans son état des lieux de la Leçon inaugurale) : elle est toujours devant lui.

Cassin y va par une philologie, une "philosophistie" (contre - j'y entends ça mais je ne sais pas bien entendre son système d'allusions encore - la critique kantienne de Ferry et Renaut contre les "philosophistes" de 68). Là on rentre dans du plus fin. Après il y a la valeur de ce renouvellement du projet philologique, et son propre rapport à la politique du comparé. On reprend les fils fins du débat entre comparatisme et structuralisme, et ses ramifications souterraines (il a fallu enterrer le débat, puis ...) depuis. Qui courent sous des débats aux "termes" (ELB) déplacés, et donc occultants. Intentionnellement ou dans le simple mouvement, sans ironie nécessairement, de l'histoire.

dimanche 9 septembre 2007

Notes de l'étranger, notes d'ici maintenant

Un nouveau temps, pour continuer le travail de Letter from America, journal de travail de l'année 2006-2007.

Tiens, voilà - en continuation du séminaire IndeA-Texte étranger sur l'histoire, écourté mais à l'oeuvre autour des "conséquences innombrables" (Saussure) de l'équation la diversité (des langues, et par les langues) comme l'historicité - : l'étranger, comme l'ici maintenant je tu. Parce que l'étranger est un modèle du déictique. Pas n'importe lequel. L'un de ses plus immédiatement politiques.